Pour un environnement professionnel sécurisant et ouvert à la diversité

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Historique et processus du IRIF charter / Charte de l'IRIF (Intranet)

Licence Creative Commons
Charte des membres de l’IRIF de IRIF est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution 4.0 International.
Fondée sur une œuvre à https://www.irif.fr/informations/charte.


Préambule

Chacune et chacun d’entre nous doit pouvoir évoluer dans le meilleur environnement de travail possible, que ce soit dans les locaux du laboratoire ou en dehors (missions, colloques, comités…). En s'appuyant sur des valeurs fondatrices, telles que les principes d'égalité, de transparence et de respect mutuel, l’IRIF cherche à assurer un environnement de travail garantissant à toutes et tous l’égalité de traitement et des chances, ouvert à la diversité, sécurisant, respectueux et exempt de discrimination et de harcèlement.

Cette charte en décrit les principes fondateurs et les modes d’application. Elle a vocation pédagogique et vise à ce que chacune et chacun puisse prendre conscience de certaines situations et s’interroge sur son comportement.

Même si la charte s’attache d'abord à garder un grand degré de généralité, elle mentionne des situations que peuvent rencontrer certaines populations auxquelles l'IRIF souhaite accorder une attention particulière, telles que les femmes, les doctorant·e·s, les personnels en soutien à la recherche et les non francophones. Dans un deuxième temps, la charte s’appuie sur des exemples de situations qui lui permettent de rendre plus concret le propos général.

Concernant les aspects déontologiques de la profession nous renvoyons le lecteur vers la charte très complète de déontologie du CNRS 1).

Egalité de traitement et de chances, ouverture à la diversité

L’IRIF souhaite garantir à chacun et chacune l’égalité de traitement et de chances, créant ainsi un environnement attractif pour une large variété de profils : des conditions de travail équitables, des opportunités de bonne intégration au laboratoire en vue de collaborations harmonieuses, des évaluations transparentes, objectives et impartiales.

L’IRIF s’attache, en situation de prise de décision, que ce soit dans le recrutement, les conditions d’emploi et de travail, le développement ou la progression de carrière, à garantir l’égalité de traitement et de chance pour toutes et tous. En particulier, l’IRIF demande dans toute situation d’évaluation scientifique ou professionnelle :

  • La production de recommandations afin d’éviter biais et discriminations ;
  • La constitution de comités aux profils variés ;
  • La mise à disposition d’indicateurs de représentativité de la communauté ;
  • L'utilisation de critères transparents et objectifs ;
  • Une déclaration systématique de tout conflit d’intérêt, même léger, qu’il soit d’ordre relationnel, collaboratif ou hiérarchique.

L’IRIF refuse catégoriquement tout acte discriminatoire qui pourrait, de manière directe ou indirecte, entraver la carrière professionnelle de chacun et chacune. Ces actes peuvent toucher des groupes minoritaires ou non, et être liés, par exemple, à leurs origines, leur sexe, leur âge, leur situation de handicap, leurs opinions…2)

Afin de mieux identifier les discriminations propres à certaines minorités présentes (ou non) au laboratoire, l’IRIF encourage la création d’espaces de discussion (comités ou événements) dédiés à cette meilleure identification.

L’IRIF s’engage à protéger la diversité, qui constitue une richesse, à la fois pour son environnement de travail et pour le développement de la science, et à l’entretenir dans sa communauté scientifique et professionnelle. L’IRIF appelle à la vigilance, dans les pratiques et la communication, afin d’entretenir et de valoriser la diversité présente au laboratoire, et encourage ses membres à faire de même.

Le laboratoire est un environnement multiculturel et regroupe des membres non francophones, notamment parmi ses doctorant·e·s, postdocs et visiteurs·euses, autant de personnes qui peuvent se retrouver isolé·e·s dans un environnement qui serait uniquement francophone. Le laboratoire demande de ne pas déconsidérer les propos émis dans une langue non maîtrisée, que ce soit le français ou l’anglais.

Le laboratoire regroupe aussi diverses professions essentielles au soutien de la recherche, qu’il convient de respecter et intégrer.

L’IRIF appelle donc à n’isoler personne, à inclure activement tous ses membres, et à prendre en compte la présence de chacun·e dans toute communication.

Dignité personnelle, respect du travail et des personnes

L’IRIF promeut un environnement de travail qui garantit la dignité personnelle, un climat de confiance et de respect, où toute personne est bienvenue et encouragée à s’exprimer avec confiance et naturel. Dans le même temps, chacune et chacun doit réfléchir à ses modes d’expression, se mettre à la place de l’autre et se questionner sur l’impact de son comportement sur l’autre. Le travail de chacun·e doit être respecté. Le laboratoire attire l’attention sur le fait que les points ci-dessous, sans être exhaustifs, peuvent nuire à ce climat de confiance et mener à du harcèlement moral :

  • Les perturbations répétées lors des prises de parole ;
  • Les tentatives d'intimidation ou de déstabilisation ;
  • Tout propos intrusif ou dénigrant, notamment les commentaires ou blagues faisant référence à des caractéristiques personnelles ou à des stéréotypes, qu’ils soient écrits ou verbaux, portant atteinte à la dignité de la personne ;
  • Les agissements à l'encontre d'une personne, qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel.

L’IRIF alerte aussi sur les situations de harcèlement moral qui peuvent se développer plus facilement qu’il n’y paraît, parfois à notre propre insu, à la faveur de pressions psychologiques trop fortes ou de modes de travail qui ne respectent pas le rythme de chacun. Ainsi l’IRIF s’oppose aux pratiques suivantes, dans tous les cadres (administration, enseignement et recherche), particulièrement dommageables lorsqu’elles s’exercent à l’encontre des doctorant·e·s ou des personnels de soutien à la recherche :

  • Fixer des objectifs inaccessibles sans aide ou jalons intermédiaires ;
  • Fixer des deadlines à la dernière minute ;
  • Envoyer plusieurs mails par jour sur le même sujet en exigeant une réponse immédiate ou formuler des requêtes sans considération de la personne qui les reçoit ;
  • Imposer son rythme de travail à l’autre sans prendre en compte ses possibles contraintes, par exemple le soir ou le week-end ;
  • Menacer de représailles, en cas de retard ou d’absence de résultat.

Protection contre les agissements sexistes et le harcèlement sexuel

Au cours de leurs études ou de leurs carrières, et notamment lorsqu’elles occupent des postes temporaires, les femmes de notre communauté scientifique sont trop souvent victimes de comportements ou de propos déplacés, discriminatoires, voire violents. Ces situations nuisent au déroulement de leur vie professionnelle, et poussent certaines à l’abandon ou la reconversion. Cet état de fait est hérité en partie des inégalités femmes-hommes dans la société, et est renforcé par le très faible nombre de femmes dans notre communauté.

Ces comportements, qu’ils relèvent d’agissements sexistes ou du harcèlement sexuel, ne touchent pas seulement les femmes, et peuvent aussi atteindre tout type de profil, et prendre des formes différentes en fonction des situations, notamment chez les personnes LGBT+. L’IRIF met donc en place une politique de prévention contre tout comportement de ce type, et les combat fermement. Le laboratoire refuse en particulier :

  • La diffusion de propos, d'images ou de vidéos à caractère sexuel, discriminatoire ou violent dans le laboratoire ;
  • Les propos déplacés sur l’habillement ;
  • Les questionnements portant sur l’intimité, l’orientation et les pratiques sexuelles ;
  • Les contacts physiques non sollicités ;
  • Les attentions non réciproques, ou les sollicitations non désirées, à caractère sexuel ou amoureux, ainsi que des demandes de sorties insistantes malgré le refus.

L’IRIF déconseille aussi fortement :

  • Les relations amoureuses entre encadré·e et encadrant·e, ou entre personnes liées par un lien hiérarchique, qui constituent un conflit d’intérêt ;
  • Et en particulier, pour tout·e encadrant·e ou supérieur·e hiérarchique, d’en être à l’initiative ou de l’encourager.

L'IRIF entend aussi être un espace inclusif, respectueux et accueillant pour la communauté LGBT+, et à ce titre soutient la Charte d’Engagement LGBT+ de l’Autre Cercle3).

Actions, aides et démarches

Que vous soyez membre de l’IRIF, invité·e ou en visite, si vous êtes victime ou témoin d’agissements en contradiction avec un des points de cette charte, dans les locaux du laboratoire ou en dehors, ne vous isolez pas, ne minimisez pas la situation, rejetez la, appuyez vous sur la charte en rappelant ses principes et exemples.

Il est aussi important d’en informer la direction du laboratoire qui est là pour porter aide et secours à toute personne de l’IRIF, membre ou visiteuse.

Si vous êtes victime, d’autres interlocuteurs ou interlocutrices sont possibles, plus proches de vous ou au contraire plus neutres, qui sont aussi là pour vous écouter et vous aider :

  • Responsables d’équipe thématique ou de pôle,
  • Correspondants doctorants, membres de la commission égalité femmes-hommes,
  • Assistant·e de prévention,
  • Services médicaux ou psychosociaux du CNRS, de l’Université de Paris ou d’Inria,
  • Partenaires extérieurs et associations.

L'intranet du laboratoire peut aussi être utile : contacts, actions possibles, et documentation liée4).


Ces situations, anonymisées et souvent en partie fictives, cherchent à rendre plus concrets les principes précédemment évoqués. Cette liste, qui n’a pas vocation à être exhaustive, manque encore de diversité et est donc amenée à s’enrichir.

Situation 0

  • En lisant cette charte, j'ai l'impression que je ne pourrai plus jamais rien dire ni faire de façon naturelle.

Cette charte ne dit pas qu'il faut renoncer à s'exprimer ou encore cesser toute relation amicale sur le lieu de travail. Au contraire, elle vise à de meilleures relations et échanges. Elle identifie des situations susceptibles d'entraîner un résultat différent de celui attendu, pouvant causer de l'inconfort chez nos interlocuteur·rice·s. En résumé, cette charte nous amène à réfléchir à certains de nos comportements et à échanger dessus.

Inclusion

Situation 1

  • Quand j'émets une idée, je ne suis pas entendu·e, mais quand une personne plus expérimentée ou un homme la répète, l’assemblée la considère. Je trouve cela très frustrant, que faire ?

Il est important de laisser chacun·e s’exprimer et de lui apporter non seulement l’attention que son travail mérite, mais aussi des éléments critiques, objectifs et concrets en retour. Il faut faire remarquer ces situations, car l'inconscient collectif a tendance à banaliser ce type de situation.

Situations 2

  • Lors de réunions, un de mes collègues a fait des remarques personnelles irrespectueuses, sur le ton de l’humour, à l’encontre d’un·e autre membre du laboratoire. Cette attitude crée une ambiance tendue, et son comportement est insultant. Comment réagir sans passer pour quelqu’un qui n’a pas le sens de l’humour ?
  • Un de mes collègues fait régulièrement des blagues sexistes ou racistes qui me mettent mal à l’aise. Que dois-je faire ?
  • Un de mes collègues tient régulièrement des propos désobligeants concernant les personnes LGBT+, sans se rendre compte qu’il peut y avoir de telles personnes autour de lui. Que dois-je faire ?
  • Dans un autre laboratoire, ou lors d’une conférence, j'ai été victime de propos ouvertement racistes/anti LGBT+. Tout le monde était clairement mal à l'aise, mais personne ne s’est exprimé·e ni ne m’a contacté·e par la suite. Je me suis senti·e très isolé·e.

Les blagues sur une caractéristique personnelle ne favorisent pas un environnement de travail respectueux. Elles remettent en cause la dignité à laquelle chacun·e a droit. Les propos, même sur le ton de blagues, de nature discriminatoire ou basées sur un stéréotype, peuvent aussi avoir les mêmes effets, quand bien même elles ne ciblent pas quelqu’un en particulier mais un groupe auquel certaines personnes peuvent s’identifier.

Il est compréhensible que la victime n’ose pas se confronter directement avec la personne qui a tenu ses propos. Elle peut essayer d’exposer le plus clairement possible son ressenti ou son point de vue à cette personne. Elle peut aussi en parler aux responsables ou collègues qui la soutiendront et agiront.

Les témoins devraient réagir immédiatement et souligner que ces propos ne sont pas admissibles. A minima, ils ou elles devraient soutenir la victime et l’encourager à signaler l'événement aux responsables du laboratoire ou aux personnes qui organisent la conférence, le cas échéant.

Situations 3

  • La dernière fois qu’il y a eu une attaque terroriste, on m’a questionné·e au travail sur mon positionnement à ce sujet. Je sens que l'on attend de moi une condamnation personnelle et explicite de ces attaques à cause de mes origines et/ou croyances réelles ou supposées.
  • Je viens d’un pays de confession majoritairement musulmane. On suppose que je suis moi-même musulmane. On me demande pourquoi je ne porte pas le voile. Ou encore, on pense que je suis opprimée, et que j’ai besoin de me libérer en tant que femme.

C’est la manifestation d’un stéréotype que d’assimiler les croyances, la culture, ou encore l’adhésion à une idéologie d’une personne à son origine ou sa couleur. Il faut l’expliquer à votre interlocuteur·rice et/ou demander que des actions de sensibilisation soient organisées dans votre lieu de travail ou de conférence.

Situation 4

  • Des collègues excluent systématiquement des conversations les personnes en soutien à la recherche en maintenant leur conversation scientifique, y compris en présence de ces personnes (café, pot, repas). Comment réagir puisqu’au fond j’ai envie de parler de science ?

Le laboratoire est composé de personnes aux multiples professions qui contribuent toutes à la recherche. Il est important d’inclure dans la vie du laboratoire tous ses membres et de ne pas les isoler. Notamment, il est nécessaire de mettre à l’aise toutes les personnes présentes dans un même lieu en les incluant dans les conversations. Comme les non-scientifiques sont minoritaires, les scientifiques doivent être vigilant·es et ont un rôle à jouer. Elles/ils peuvent parler de leur recherche en la vulgarisant, mais surtout chercher à s’intéresser à la vie et au travail de l’autre.

Situations 5

  • Un collègue masculin me fait systématiquement la bise le matin parce que je suis une femme, tandis qu’un autre ne me serre jamais la main alors qu’il le fait aux autres collègues masculins présents, sous prétexte que je suis une femme. Ces deux situations me mettent mal à l’aise, comment y remédier ?
  • Lorsque j’arrive dans un groupe, j’ai l’habitude de saluer les gens que je connais par une bise ou une poignée de main, mais je n’adresse qu’un simple bonjour à ceux que je connais moins, peut-être parce que je suis plus hésitant·e sur les usages de leur culture. Je réalise que mon comportement peut peut-être isoler ces personnes.

Dans le cadre professionnel, il est légitime que toute personne demande à être saluée de la même manière que le reste du groupe. Il faut donc éviter des pratiques qui peuvent exclure de fait certaines personnes. En cas de doute quant au comportement à adopter, il ne faut pas hésiter à poser la question pour savoir ce que la personne en face souhaiterait. Il ne faut pas hésiter à faire part du malaise ressenti et à en expliquer les raisons.

Situation 6

  • J'ai des cheveux crépus que les gens me demandent souvent de toucher, ou bien elles/ils le font directement.

Subir une curiosité non désirée à propos de son corps donne l'impression d’être hors-norme. Il est déjà invasif de demander à toucher les cheveux ou tout autre partie du corps ; c’est encore plus invasif de le faire sans demande préalable.

Stéréotypes et intégrité

Situation 7

  • Un·e membre retraité·e du laboratoire y reste très présent·e. Elle/il est maintenant bien plus disponible et prêt·e à aider dans un certain nombre de tâches, où il/elle pourrait partager ses compétences et son “expérience” : organisation d’événements, relecture d’articles ou de dossiers administratifs… Elle/il est pourtant peu sollicité·e, se sent parfois qualifié·e de “has been”, et ressent souvent de la méfiance à son endroit. En résumé, il/elle entend assez fortement la phrase “pourquoi tu ne prends pas vraiment ta retraite (bien méritée) ?” même si elle n’est pas effectivement prononcée. Que peut faire chacun·e des protagonistes (retraité·e et laboratoire) ?

C’est un exemple de stéréotype lié à l’âge. Ce n’est pas parce que l’on est âgé·e que l’on doit totalement se retirer. Le laboratoire se doit de bien accueillir ses membres retraité·e·s, et réfléchir à la place qu’il leur réserve lorsqu’ils ou elles décident de maintenir leur activité. En retour, la/le retraité·e doit accepter de laisser les rôles principaux à ses collègues plus jeunes et proposer sans s’imposer.

Situation 8

  • Un·e membre du laboratoire a, en ce moment, des contraintes/difficultés personnelles ou professionnelles très lourdes (retour de congé maternité, obligations familiales, situation de maladie/handicap, responsabilités administratives importantes…). Elle/il a l’impression qu’on ne le/la sollicite plus pour participer à des projets scientifiques, des prises de responsabilités, l’organisation de conférences, et le vit mal. Pourtant, le groupe proche adopte cette position afin de la/le protéger, jusqu’au moment où elle/il sera de nouveau plus disponible. A-t-il raison ? Que peut faire chacun·e des protagonistes (membre en difficulté, groupe proche) ?

C’est un exemple de stéréotype, qui affirme qu’on doit protéger les membres dans une situation professionnelle ou personnelle difficile, en évitant de trop les solliciter, et sans vraiment leur demander leur avis. Il faut au contraire que les deux protagonistes engagent un véritable dialogue. Le/la membre concerné·e peut alors décrire ses contraintes et exprimer ses attentes ; le groupe les écoute, propose des pistes d’aménagement (adaptation des horaires de réunion, par exemple) et lui permet de décider ce qu’il ou elle veut faire.

Situation 9

  • Je suis sollicité·e pour un jury de prix. J’ai travaillé avec un·e des candidat·es, mais je pense que je peux être objectif/objective dans mon évaluation. Je ne compte donc pas mentionner le conflit qui jetterait un doute sur mon soutien, d’autant plus que je suis la personne la plus qualifiée pour défendre son dossier. Ai-je tort ?

Toute situation de conflit d’intérêt doit être mentionnée. Dans ce cas, seul·e le/la président·e du jury sera à même de décider s’il y a conflit ou non. Cela évitera de discréditer le ou la lauréate, ainsi que l’ensemble du processus d’attribution du prix.

Situation 10

  • Un résultat scientifique important est issu d’une collaboration entre deux personnes, dont l’une est beaucoup plus connue que l’autre. Suivant un stéréotype et l’alimentant, la communauté scientifique attribue tous les bénéfices du résultat à la personne la plus connue au détriment de l’autre. Que peut-on faire pour s’opposer à ce stéréotype ? Comment gérer la situation quand les co-auteurs sont en couple ?

Il faut inviter prioritairement la personne moins connue ou inconnue à des séminaires et colloques. Chacun·e s'adresse à elle, lors de son exposé, pour poser ses questions, même en présence de l’autre scientifique (qui s’abstiendra de répondre en dehors de sollicitations explicites). Lorsqu’on parle de ce résultat à son entourage, on mentionnera l'ensemble des scientifiques sans se limiter à la personne plus connue.

La personne plus réputée devra aussi prendre conscience de l'ombre qu’elle porte à la personne moins connue ; si ce n’est pas le cas, son entourage devra l’amener à cette prise de conscience. En cas d'invitation, elle pourra proposer l’autre personne moins connue à sa place, en expliquant pourquoi. Si elle décide d’accepter l’invitation, elle mentionnera explicitement pendant son exposé le rôle de l’autre personne et les points où son apport est le plus important. Enfin, si elle est sollicitée pour une lettre de recommandation, elle décrira, là aussi, explicitement, le rôle de l’autre personne dans les résultats obtenus.

La personne moins connue ne devrait pas rester passive et oser parler de ce résultat, et en faire la publicité, sans détour ni modestie excessive. Lors de ses candidatures, ou de la rédaction de ses projets, elle s'attribue les résultats obtenus, en utilisant la première personne du pluriel pour inclure la personne plus réputée, sans oublier de la mentionner.

La situation est plus délicate dans le cas d’un couple : l’approche suggérée précédemment à la personne la plus connue peut alors être assimilée, de l’extérieur, à un conflit d’intérêt. Néanmoins, la communauté peut toujours jouer son rôle, comme proposé.

Intimité, harcèlement sexuel

Situation 11

  • Comment manifester ses sentiments amoureux à un ou une collègue, sans créer un sentiment de malaise qui nuirait à la personne et à ses conditions de travail ?

Il est préférable de faire part de ses sentiments dans un lieu non professionnel. Il est important d’avoir des comportements positifs et respectueux, laissant la possibilité d’un refus, de savoir l’entendre et de le respecter. Enfin, il faut souligner que des sollicitations et demandes répétées qui ne sont pas voulues et acceptées peuvent relever du harcèlement.

Situation 12

  • Comment se manifeste le harcèlement sexuel ? Comment juger qu’un comportement s’assimile à du harcèlement sexiste ou sexuel et que les limites sont dépassées, que ce soit au laboratoire ou lors d’une conférence ?

L’Université de Paris a émis un guide à ce sujet5). Le harcèlement sexuel peut se manifester de façon verbale ou non verbale. Il n’est pas nécessaire qu’il y ait une relation hiérarchique. Un silence suffit pour manifester son non consentement.

La situation de harcèlement sexuel à laquelle on se réfère le plus souvent consiste à user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle. Mais, à titre d’exemple, peuvent aussi être assimilés à du harcèlement les comportements suivants : questionner l’autre sur son intimité et lui faire des confidences sur sa propre vie sexuelle ; faire des commentaires sur le physique, la tenue vestimentaire ou le comportement de l’autre ; regarder avec insistance ; imposer continuellement sa présence.

Situation 13

  • En conférence, il est parfois difficile de trouver un endroit pour travailler. La chambre d’hôtel devient un espace de travail. Comment faire pour inviter un·e collègue ou un·e étudiant·e à travailler dans notre chambre sans ambiguïté ?

Malgré toute la bienveillance possible, cette situation est assimillable à du harcèlement sexuel, et doit être proscrite. Une alternative est de choisir un lieu plus neutre, comme une salle de travail ou un café.

Encadrement

Situation 14

  • J’encadre la thèse d'une personne avec qui j’ai, ou aimerais initier, une relation amoureuse. Quels problèmes peuvent se poser ? Est-il opportun de poursuivre cet encadrement ?6)

La relation encadré·e/encadrant·e est, par nature, asymétrique. L’encadrant·e bénéficie d’une position d’autorité et de la confiance de l’encadré·e, et a aussi un rôle important dans le début de sa carrière. Les relations intimes encadré·e/encadrant·e sont donc fortement déconseillées : elles constituent un conflit d’intérêt, et doivent donc être déclarées aux directions de l’Ecole Doctorale et de l’IRIF. L’encadrant·e ne devrait ni en être à l’initiative, ni les encourager. Dans le cas de relations intimes existantes, et afin de protéger l’encadré·e, l’IRIF demande à l’encadrant·e de se déporter de la thèse au profit d'un·e collègue, et s’assurera que le contrat soit bien maintenu.

Situation 15

  • L'attitude de mon directeur ou de ma directrice de thèse me met mal à l'aise. Sa communication est ambiguë et manque d'empathie : je ne suis jamais sûr·e s'il/elle me critique ou pas, et il/elle ne me donne jamais de pistes claires pour m'améliorer. Je me sens très affecté·e et commence à douter de mes capacités. Que dois-je faire ?

Le binôme encadré·e/encadrant·e repose sur une alchimie complexe. La confiance et la transparence sont importantes. Si exposer votre ressenti ne fonctionne pas ou vous semble trop difficile, pensez à passer par un·e intermédiaire comme un·e des membres de la commission de suivi des doctorant·e·s, l'assistant·e de prévention ou la direction du laboratoire. Si vous ne parvenez pas à améliorer la situation, il faut peut-être envisager de changer d'encadrant·e. Enfin, il faut savoir que fixer des objectifs impossibles à réaliser sans procurer la moindre aide peut être assimilé à du harcèlement moral.

Situation 16

  • J'ai l'impression que mon encadrant·e ne traite pas l'ensemble de ses doctorant·e·s de manière égale et que je suis souvent exclu·e de certains projets et collaborations, contrairement à ses autres doctorant·e·s.

Opérer une différenciation entre les doctorant·e·s peut créer chez elles ou eux un sentiment d'isolement ou d'exclusion. Même si les doctorant·e·s du même encadrant n'ont pas les mêmes sujets de recherche et n’ont pas besoin des mêmes temps d'encadrement, il est essentiel de se conduire envers elles et eux de manière équitable, et de leur offrir, autant que possible, les mêmes opportunités. Si les différences de traitement entre doctorant·e·s s’avèrent légitimes, il est alors important, pour l’encadrant·e, de bien l’expliquer à toutes et tous. En tant que doctorant·e, si vous ne comprenez pas cette situation ou qu’elle vous fait souffrir, n’hésitez pas à en parler au plus tôt à votre directeur ou directrice de thèse, ou à un·e intermédiaire.

Ouverture internationale, appréhension de la langue

Situation 17

  • L’intégration de mes doctorant·e·s non francophones est rendue difficile à cause du problème de la langue : autour de moi comme au laboratoire, la communication se fait surtout en français. Puis-je demander à ce qu’on parle par défaut en anglais ?

Avant de recruter ou d’inviter un·e non-francophone, il faut bien imaginer son environnement futur et ne pas hésiter à lui en faire part. L’environnement du laboratoire est francophone et s’exprimer en français est un droit en France, même si chacun·e, au laboratoire, fait des efforts sur la langue employée pour communiquer. Il faut d’abord lui indiquer les cours de français gratuits disponibles sur l’Université et au CNRS. Il faut ensuite essayer de communiquer a minima en anglais, ne serait-ce que pour les points essentiels ; nous le faisons déjà, pour la plupart, dans le cadre de nos conférences ou missions. Si nous imaginons de fortes difficultés potentielles dues à la langue, nous devons en informer la future personne recrutée.

Situations 18

  • D’origine étrangère, lorsque je fais un commentaire de fond sur un travail en français (par exemple l’organisation ou le contenu d’un exposé, rapport, demande de financement…), on me reprend souvent sur mon français et mon accent, ou en me disant qu’en France on fait autrement, sans me répondre sur le fond. Que faire ?
  • Des collègues excluent systématiquement les visiteurs et visiteuses non francophones des conversations en maintenant leur conversation en français, y compris lorsque cela concerne ces mêmes personnes. Comment réagir puisqu’au fond parler français est aussi un droit ?

Si l’on constate qu’il n’est pas répondu sur le fond à nos commentaires, et ce qu’importe la raison, il faut le souligner et insister pour avoir une réponse. Si malgré cela la situation perdure, il est recommandé de contacter la direction du laboratoire ou un des contacts suggérés dans la charte.

Par ailleurs, la recherche étant par nature multiculturelle, il est important d’inclure au maximum toutes les personnes présentes à un événement / une réunion… Cela passe notamment par la langue employée pour échanger. En tant que francophone, il est important d’être vigilant à cela. Une façon de procéder est de poursuivre soi-même la conversation en anglais ou de le réclamer, car cela sera toujours plus facile à faire que pour le ou la visiteuse (non-francophone).

Situations 19

  • Je dois écrire un courriel qui peut concerner des membres non francophones du laboratoire mais je n’ai pas le temps ou la capacité de le traduire en anglais, que dois-je faire ?
  • Mon niveau en français ne me permet pas de comprendre les courriels, pourtant certains contiennent des informations importantes et ne sont écrits qu'en français, que faire ?

Si on envoie un courriel pouvant concerner des membres non francophones, il est conseillé de l’envoyer soit en anglais, soit en français avec une traduction en anglais. Dans le cas où traduire tout le message est trop long ou trop difficile, il est recommandé au minimum de traduire le titre et d’inclure un très court résumé du contenu en anglais au début du message.

Pour les non-francophones, il existe aussi des outils de traduction automatique, qui, bien qu’imparfaits, permettent de se faire une idée rapide du contenu et de l’importance du sujet. Il est ensuite tout à fait naturel de demander à un francophone, par exemple la personne qui a envoyé le mail ou un·e collègue, d’en éclaircir les points ambigus.


Cette partie regroupe les textes de lois applicables, afin que chacun puisse appréhender les définitions juridiques des termes évoqués dans la charte.

Agissement sexiste

Article 6 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (extrait)

Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leur sexe.

Aucun fonctionnaire ne doit subir d'agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

Harcèlement sexuel

Article 222-33 du Code Pénal

I. - Le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

L'infraction est également constituée :

  1. Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;
  2. Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.

II. - Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.

III. - Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende.

Ces peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende lorsque les faits sont commis :

  1. Par une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;
  2. Sur un mineur de quinze ans ;
  3. Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;
  4. Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ;
  5. Par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ;
  6. Par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique ;
  7. Alors qu'un mineur était présent et y a assisté ;
  8. Par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait.

Harcèlement moral

Article 222-33-2 du Code pénal

Le fait de harceler autrui par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende.

Discrimination

Article 225-1 du Code pénal (extrait)

Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de leur situation économique, apparente ou connue de son auteur, de leur patronyme, de leur lieu de résidence, de leur état de santé, de leur perte d'autonomie, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée.

Article 225-1-1 du Code pénal

Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes parce qu'elles ont subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l'article 222-33 ou témoigné de tels faits, y compris, dans le cas mentionné au I du même article, si les propos ou comportements n'ont pas été répétés.


2)
Pour rappel, la loi interdit la discrimination selon une liste de 25 critères prohibés dans l’article 225-1 du code pénal. Cette liste est reprise dans les articles de lois inclus dans ce document. Des dispositions particulières peuvent être prévues en fonction des situations professionnelles.
4)
Pour plus d’informations à ce sujet, y compris concernant les coordonnées des contacts et les actions possibles, voir l’intranet du laboratoire : https://www.irif.fr/intranet/harassment
5)
Guide disponible sur le site de l’Université ainsi que la description d’un dispositif spécifique : https://u-paris.fr/lutte-contre-le-harcelement-sexiste-et-sexuel/
6)
Réponse inspirée des recommandations du 08/07/2020 du CS de l’INS2I : https://www.cnrs.fr/comitenational/cs/recommandations/15-16_avril_2019/Rcommandation-CS-CNRS_Parite.pdf