Gaëtan Douéneau-Tabot, ancien doctorant à l'Irif : optimiser pour toujours plus d'efficacité “En pratique, il est essentiel d’avoir des programmes efficaces, c’est-à-dire dont la consommation de ressources (mémoire, temps, etc.) est réduite au strict nécessaire. Dans mes travaux, je me pose la question générique suivante : on prend en entrée un programme, et on se demande s’il existe un programme « plus efficace » qui fait la même chose, auquel cas on veut le construire. ” Gaëtan Douéneau-Tabot, ancien doctorant. Lien de sa thèse : Optimization of string transducers. Peux-tu te présenter succinctement ? Je m’appelle Gaëtan Douéneau-Tabot, et j’ai soutenu ma thèse en novembre 2023. Originaire de Bretagne, j’ai intégré l’ENS Paris-Saclay (qui s’appelait encore ENS Cachan à l'époque) en maths-info en 2015. A la sortie de l’ENS, j’ai rejoint le corps des Ingénieurs de l’Armement, rattaché au Ministère des Armées. Dans le même temps, j’ai commencé ma thèse à l’IRIF sous la direction d’Olivier Carton (Université Paris Cité) et d’Emmanuel Filiot (Université Libre de Bruxelles). Qu’est-ce qui t’a amené à faire de la recherche ? Je souhaite depuis longtemps travailler dans la fonction publique. Combiné à mon intérêt pour les questions scientifiques, cela m’a naturellement amené à rejoindre l’ENS Paris-Saclay en sortant de prépa. Lors de mes cours à l'ENS, j’ai découvert les fondements de l’informatique (calculabilité, logique, graphes, algèbre, etc.) et leurs applications (algorithmique, vérification formelle, bases de données, etc.), ce que j’ai trouvé passionnant. Pendant mes stages de recherche puis ma thèse, je me suis progressivement centré sur l’étude d’objets appelés automates et transducteurs, qui sont des programmes utilisant exclusivement une mémoire bornée. Peux-tu nous décrire le cœur de ta thèse en quelques phrases ? Ma thèse s’intéresse à des questions d’optimisation de programmes. En pratique, il est essentiel d’avoir des programmes efficaces, c’est-à-dire dont la consommation de ressources (mémoire, temps, etc.) est réduite au strict nécessaire. Dans mes travaux, je me pose la question générique suivante : on prend en entrée un programme, et on se demande s’il existe un programme « plus efficace » qui fait la même chose, auquel cas on veut le construire. Ces questions sont très difficiles (voire impossibles) à résoudre si on regarde tous les programmes possibles. Afin d’obtenir des procédures d’optimisation utilisables, je m’intéresse uniquement à des programmes restreints appelés « transducteurs ». Ce sont des programmes qui disposent d’une mémoire bornée et qui manipulent des chaînes de caractères (cf. illustration). En pratique, ils sont utilisés dans de nombreux domaines tels que la compilation, le traitement des langages ou l’arithmétique des ordinateurs. En outre, ils modélisent des algorithmes qui manipulent des flux de données arbitrairement longs, et qui doivent traiter ces entrées sans utiliser trop de mémoire auxiliaire. Certains modèles de transducteurs sont étudiés depuis les années 1950, mais le sujet a connu un regain d’intérêt important depuis les années 2000, notamment à travers l'étude de modèles de plus en plus complexes et expressifs. Quels sont tes projets désormais ? Je vois le doctorat comme une expérience professionnelle et une formation « par la recherche », mais pas exclusivement « pour la recherche ». Même si je suis heureux et fier de mes travaux de thèse, je ne pense pas poursuivre ma carrière dans le milieu académique. En fait, c'est un choix que j’avais déjà fait au moment où j’ai intégré le corps des Ingénieurs de l’Armement. J'ai d’ailleurs réalisé ma thèse en parallèle d’un poste au Ministère des Armées, où je travaille sur les futures générations de satellites militaires. Maintenant que j’ai obtenu mon doctorat, je compte poursuivre une carrière de haut fonctionnaire sur les sujets numériques, au service de l’État. Dans ce cadre, avoir réalisé une thèse en informatique est d’un intérêt double : d’une part, pour disposer d'une certaine légitimité vis-à-vis des chercheurs et des experts avec qui je suis amené à travailler, et d’autre part, car le doctorat est particulièrement reconnu dans les instances internationales, notamment européennes.