Rencontre avec Giulio Manzonetto, professeur des universités Passionné par son domaine de recherche jusqu'à en devenir workaholic, Giulio Manzonetto maîtrise également l'art de l'humour. Si une lettre grecque devait le représenter, ce serait le Lambda à l'image de son sujet de prédilection et des dessins qu'il fait avec sa fille. Rencontre avec Giulio Manzonetto qui vient de rejoindre l'IRIF en tant que professeur des universités. “Mon domaine d'intérêt est passé de la programmation à la théorie, j’ai fait un Erasmus à Amsterdam qui m’a ouvert le champ des possibles. Quand j'ai découvert le lambda calcul, j'y ai découvert une beauté, qui m'a passionné. Giulio Manzonetto, maître de conférence | Pôle Preuves, programmes et systèmes - Équipes Algèbre et calcul et Preuves et programmes Parlez-nous de votre parcours. Avez-vous rencontré des difficultés ? J'ai commencé l’université en Italie après une année à Udine pour échapper à mes parents, puis j'ai fait l'université à Venise, où j'ai rencontré Antonino Salibra qui m'a encouragé à faire un doctorat avec lui. Je venais toutes les années à Paris pour travailler avec lui à l'Université Paris VII avec Antonio Bucciarelli. C'est ce dernier qui m’a conseillé de rester ici pour continuer mes recherches. J'ai donc fini par faire un doctorat en co-tutelle. J'ai rencontré ma femme ici, elle est aussi italienne et elle a aussi fait une thèse à Paris VII. Notre problème a été de trouver un travail au même endroit. Pendant qu'elle était en thèse à Paris, j'avais fini la mienne et j'étais en post-doc aux Pays-Bas. Puis je suis revenu en France en 2013 en tant que Maître de Conférence à l'Université Sorbonne Paris Nord et elle est partie en Post-doc à Vienne. Puis elle a fait une Marie-Curie à Jérusalem. Nous avons donc surtout rencontré des problèmes logistiques. En quoi consiste votre travail de recherche ? En général, j'étudie la relation entre la programmation et la logique à travers le système de type. J'ai aussi beaucoup étudié le lambda calcul non typé, qui a été un sujet principal en informatique théorique pendant 50 ans et maintenant, c'est plus sous-jacent aux recherches récentes, mais ce n'est plus l'étude principale des chercheurs. Actuellement, j'étudie surtout la notion d’équivalences entre programmes d'un point de vue syntaxique et opérationnel, ainsi que d'un point de vue sémantique. Quels sont les concepts clés abordés ? J'essaie de comprendre que signifie que deux programmes sont équivalents. C'est important en informatique parce que, par exemple, les optimisations que fait un compilateur sont bien censées préserver la signification du programme. On étudie cela en pleine généralité dans un cadre théorique. D’où vient votre passion pour ce domaine ? Quand j’avais 10 ans, au collège, mon enseignant avait demandé ce qu’on voulait faire quand nous serions grands, et moi, j'avais écrit “programmeur”. À l'époque, mon père avait ramené une Amiga 500, premier ordinateur après le Commordore 64 et j'essayais de comprendre comment il fonctionnait. Je me disais quand je serais grand, je comprendrais. Du coup, après le lycée, j'ai fait informatique à l’université. Et là, j'étais étonné de pouvoir étudier quelque chose qui m'intéressait enfin. J'étais étonné de voir que je pouvais avoir des professeurs qui m'expliquaient des sujets qui m'intéressaient. Mon domaine d'intérêt est passé de la programmation à la théorie, j’ai fait un Erasmus à Amsterdam qui m’a ouvert le champ des possibles. Quand j'ai découvert le lambda calcul, j'y ai découvert une beauté, qui m'a passionné. Qu'est-ce qui t'a fait passer de la programmation à la théorie ? J'étais moins doué pour la programmation que pour l'étude théorique de programmes. Qu’est-ce que vous espérez développer à l’IRIF ? J'aimerais réussir à créer un groupe de recherche autour de ces thématiques de logiques linéaire appliquées à l'étude de langages de programmation et en particulier autour du lambda calcul, utile dans le cadre de langages de programmation fonctionnel. Quelles seraient les prochaines étapes de votre aventure professionnelle ? J’attends la retraite ! Plaisanterie à part, je veux monter des projets de recherche autour de thématiques qui m’intéressent. Je suis dans une période de ma carrière où je viens de terminer l'écriture d'un livre, ”A Lambda calculus Satellite“ écrit avec Henk Barendregt, c'est lui qui avait écrit le premier livre "The Lambda Calculus. Its Syntax and Semantics (Studies in Logic)" . J'ai terminé un gros projet, je souhaite désormais en commencer de nouveaux. Avez-vous une anecdote professionnelle (ou personnelle) à partager ? Pour écrire ce livre, je rencontrais souvent Henk Barendregt pendant quelques semaines pour travailler intensément. On travaillait pendant la semaine, parfois le week-end également, et une fois, à Paris, on s'est rencontré ici à l’IRIF pour travailler un dimanche. Lorsque nous sommes partis, on est sorti du mauvais côté et on s'est retrouvés bloqués dans la cour, en bas, sans pouvoir sortir avec personne autour. On a vraiment cru rester là tout le dimanche, jusqu'au lendemain. À force de hurler, la sécurité a fini par nous entendre et nous ouvrir. As-tu une passion, une recommandation à faire ? Je suis très paresseux, je pense que les chercheurs sont un peu comme les enfants, alors quand j'ai du temps libre, je joue à des jeux de construction avec ma fille ou à des jeux vidéo d'aventure graphique. Certains jeux vidés de mon enfance sont réédités, ce qui n'est pas toujours une réussite, mais, parfois, c'est vraiment très bien, et je replonge dedans. Je faisais également de la basse, je joue des morceaux pop rock, mais je n'en fais plus que rarement. J'écoute également beaucoup de podcasts, de stand-up comédie, en italien ou en anglais. J'aime particulièrement ceux de Ricky Gervais, car j'adore le non-politiquement correct. Biographie express 2023 : Professeur des universités à l'IRIF 2011 : Maître de conférence à l'Université Sorbonne Paris Nord (USPN) 2010 - 2011 : Université Radboud de Nimègue aux Pays-Bas, Sous la supervision de Henk Barendregt 2010 : Post-doc Paris 13 Sorbonne Paris Nord 2009 : Post-doc Inria Rocquencourt Jean-Jacques Lévy 2008 - 2009 : ATER Irif 2008 : Thèse en co-tutelle avec l'université Ca' Foscari de Venise et Paris Diderot aujourd'hui devenue Paris Cité